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Notre industrie

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A l’heure où la crise du COVID n’a pas terminé de nous bousculer, la question de notre industrie refait surface. Ce mot avait été oublié dans le langage politique et depuis quelques temps, il réapparait, au même titre que la souveraineté (ou, comment faire pour maitriser le destin de notre pays ?).

L’industrie est une notion qui m’est chère, non seulement du fait de ma formation, mais également par conviction. Et au-delà de toutes considérations philosophiques, je ressens l’envie, j’ai besoin de produire du concret.

Mais cette industrie, où est-elle donc passée ? A-t-on tout perdu ? Quels seraient les enjeux et les bénéfices d’une « réindustrialisation » ?

Les 30 glorieuses, un âge d’or et quelques impuretés…

Sans refaire toute l’histoire de France, allons voir ce qui s’est passé de 1945 à 1973, pendant les 30 glorieuses. Impossible de résumer cela en quelques mots, je vais donc sélectionner quelques éléments et vous pourrez aller consulter un article complet et bien écrit ici.

Je ne souhaite pas faire dans la nostalgie ou le « c’était mieux avant », comment pourrais-je ? Je n’y étais pas ! Il s’agit ici de comprendre ce qu’était la France à ce moment, et ce qu’elle nous a permis de réaliser. Donc, le contexte : fin de la Seconde Guerre mondiale, un pays en reconstruction, où il faut « rattraper » les pertes en capital par tête. Les pays les plus industrialisés comme la France connaissent alors une croissance jamais vue qui flirte avec les 5%. La guerre a contribué à dynamiser grandement l’innovation et ses applications industrielles. Les pays en reconstruction ont bénéficié de gains de productivité impressionnants. Mais la demande, les structures étatiques, la coopération internationale sont autant d’éléments contributeurs, et il ne faut pas les occulter. Le contexte général était propice et nécessaire à l’enrichissement et à la consommation de masse. L’aviation, les transports, la métallurgie et bien d’autres secteurs ont tiré parti de cette phase de redressement. Aujourd’hui encore, ils sont présents dans notre imaginaire collectif et contribuent à une certaine nostalgie.

Même si les 30 glorieuses ont un petit air de jardin d’Eden industriel, n’oublions pas d’une part ce que nos aïeux ont subi pour y arriver et d’autre part les conséquences environnementales de cette période. Ce modèle de croissance exponentiel a montré ses limites tant au niveau de l’exploitation des ressources fossiles (75% de l’énergie consommée par les pays de l’OCDE était issue du pétrole) que de l’impact sur l’économie mondiale avec les premiers chocs pétroliers (https://www.economie.gouv.fr/facileco/chocs-petroliers).

Une entreprise sans usine, ça produit quoi ?

Au cours des années 1990, la donne s’est inversée. L’image de l’industrie s’est dégradée. Les projets industriels planifiés par les hautes instances étatiques n’eurent qu’un faible succès et des coûts tellement importants que, peu à peu, la désindustrialisation a démarré (https://www.frenchweb.fr/les-plans-industriels-des-30-glorieuses/253069). L’effet de cette désindustrialisation est tel que nous sommes en train de perdre notre culture de pays producteur. L’industrie, les usines, les ateliers ont mauvaise réputation, ils ont une image de lieux polluant, de lieux d’aliénation. La production locale est peu à peu remplacée par de l’importation de biens manufacturés. Ils sont moins chers. Ils viennent de loin. On ne voit pas les usines de production. Tout n’est pas négatif, entre 1970 et 2014 la production a progressé en valeur de 5,2%, elle est cependant supplantée par les importations qui, sur la même période ont augmenté de 8,4%.

La France s’est transformée en pays de service, de finance, de tourisme. Aujourd’hui l’industrie ne représente que 10% du PIB, soit deux fois moins que la norme fixés par Bruxelles pour les pays de l’union Européenne (Marianne hors-série, L’industrie pour redresser la France).

Un pays où l’entreprise sans usine règne peut-il subvenir quand les usines, elles, ne peuvent plus le livrer ? Les récents évènements tendent à me faire penser que non.

Encore une fois, j’essaie de résumer des sujets bien complexes et je ne prétends pas à l’exhaustivité ni à la plus grande pertinence. Je fournis de la matière à réflexion, à débat.

Avec tous ces constats, que serait un pays souverain en terme d’industrie ? Quelles perspectives pourraient s’ouvrir à nous ? Que faire ?

Je commencerais par une première contrainte : l’environnement. Jusqu’à maintenant, nous l’avons sacrifié sur l’autel de la croissance. L’environnement n’est pas un choix, un élément de marketing, ou encore un problème politique. C’est une contrainte, un élément clef dans notre survie, un élément sans lequel nous ne pouvons plus établir un projet. Si je veux poster une vidéo sur Youtube, je dois respecter les contraintes de cette plateforme. Si je veux développer un projet industriel, je dois respecter les contraintes environnementales. Produire sans détruire, c’est possible, mais c’est du travail.

Ensuite, il y a une composante « marketing », rendre l’industrie sexy, sortir de cette image type « Germinal » qui fait froid dans le dos. Cela se fait en commençant par redonner à ses métiers une importance, une attractivité en développant et encourageant l’apprentissage, l’alternance et en renforçant les formations dès le plus jeune âge.

Enfin, et c’est n’est pas exhaustif, produire, ce n’est pas sur-produire, c’est être en accord avec les besoins, c’est comprendre les impératifs et attentes des clients. Rapprocher l’usine du client, se remettre en question, en permanence. Tester les produits, améliorer les process, casser les codes « cols blancs », « cols bleus » en donnant à chacun l’opportunité de développer ses compétences dans l’entreprise. L’industrie peut rimer avec bien être et épanouissement si elle n’est pas synonyme de productivité aveugle, mais d’amélioration continue, d’innovation et d’initiatives entrepreneuriales.

Un article est bien trop court pour développer le sujet, et encore une fois, ces articles ont pour vocation d’exprimer une opinion personnelle et d’ouvrir le débat. Le chemin sera long pour une réindustrialisation, qu’elle soit Française ou Européenne. Je pense qu’elle est vitale, pour nous et pour notre planète.

Yan

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Photo by Tom Austin on Unsplash

1 Comment

  1. […] les raisons, c’est la situation actuelle. (quelques réflexions personnelles sur le sujet ici…). Alors, faut-il se contenter de cet état ou voir cela comme une chance de rebond […]

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